Hani Ramadan a été expulsé de France vers la Suisse en avril 2017, voyant ainsi ses nombreuses conférences prévues sur le sol français être annulées les unes après les autres. L’Union Française des Consommateurs Musulmans (UFCM) s’organise pour tenter de faire entendre sa voix à tous prix en France : le 14 octobre 2017 elle met en place une conférence avec retransmission en direct d’Hani Ramadan à la gloire de son grand-père, fondateur des Frères musulmans : « Hassan al-Banna, sa vie et sa pensée ». Les bénéfices sont reversés… aux frais de justice.
L’UFCM, créée en 2011, se présente sur son site web comme une organisation de promotion de consommation « éthique », avec quelques références altermondialistes, anticapitalistes, qui côtoient une rhétorique religieuse : « Le Créateur, qui a doté l’être humain d’aptitudes exceptionnelles, l’a également responsabilisé. Il doit ainsi s’opposer à tout ce qui pourrait pervertir et voiler les signes de la présence du Très-Haut. Et ces signes sont tout aussi présents dans notre propre être et dans les Textes révélés que dans le monde qu’Il a créé. »
Son bureau se compose de Samy Debah, fondateur du CCIF, ainsi que d’Abdessamad Habib, aux côtés de Zouhair Amri, Nabil Ennasri, Fateh Kimouche aka Al Kanz et Yamin Makri.
Sur les réseaux sociaux, l’UFCM poste essentiellement des vidéos de Tariq Ramadan (parfois en conférence conjointe avec Yamin Makri), des vidéos de l’imam Mohamed Minta, des appels au boycott d’Israël par le mouvement BDS, des manifestations pro-palestiniennes aux mots d’ordre douteux, ainsi que des conseils sur le marché du Halal via notamment le site Al-Kanz de Fateh Kimouche.
Une conférence avec le professeur Oberlin est organisée par l’UFCM en novembre 2015. Christophe Oberlin est un militant bien connu des milieux « antisionistes », il est un compagnon de route de Dieudonné (en 2016 il participe à son émission en ligne) et d’Alain Soral (il apparait de très nombreuses fois sur son site Egalité et Réconciliation, notamment par le biais d’interview).
On trouve aussi sur la page Facebook de l’UFCM des propositions de stages dans une « ferme agrobiologique musulmane », l’ilot des Combes, promue également par Pierre Rabhi via son association Le Mouvement Colibris. Des stages de survie en milieu naturel sont également proposés.
Ou quand l’UFCM réussit à réunir l’idéologie dure des Frères musulmans, avec un anticapitalisme soft, un écologisme tendance confusionniste, et un antisionisme douteux…
Dalia Mogahed est une universitaire américaine née en Égypte en 1974. A la fois directrice de son entreprise de conseil spécialisée dans le Moyen-Orient, Mogahed Consulting, et directrice de recherche à l’Institute for Social Policy and Understanding, elle a été recrutée en 2009 par l’administration Obama comme conseillère au Bureau des partenariats confessionnels de la Maison Blanche. Elle a auparavant travaillé en tant que directrice exécutive du centre d’études musulmanes Gallup. Mogahed a également été invitée à témoigner devant la Commission des relations étrangères du Sénat des États-Unis sur l’engagement des États-Unis auprès des communautés musulmanes et elle siège au Conseil consultatif sur la sécurité intérieure du Département des États-Unis. Elle a ainsi rejoint Madeleine Albright et Dennis Ross comme une voix de premier plan dans le projet d’engagement entre les États-Unis et les musulmans. Elle est la première conseillère voilée de la Maison Blanche.
Le magazine Arabian Business l’a désignée comme la femme arabe la plus influente dans le monde, et le Centre Royal d’Etudes Stratégiques Islamiques a inclus Mogahed dans la liste des 500 musulmans les plus influents dans le monde. Elle a également été récompensée par le prix de l’Entrepreneur social arabe de l’année par l’organisation indienne Ashoka.
Dans son rôle en tant que scientifique Gallup, Mogahed a souvent été invitée comme commentateur dans les médias et les forums internationaux. Ses analyses ont été publiées dans le Wall Street Journal, le magazine Foreign Policy, le Harvard International Review, et de nombreuses autres revues académiques et populaires. Son auditoire comprenait des chefs d’État, des parlementaires du monde entier et des leaders religieux de toutes les confessions.
Elle se fait vraiment connaître en 2007 dans le milieu universitaire aux Etats-Unis en écrivant avec le compagnon de route des Frères musulmans américains John Esposito : Who Speaks for Islam?: What a Billion Muslims Really Think. Elle y expose sa propre vision de la Charia, qu’elle décrit comme universelle : « une boussole [morale] reflétant des principes valables à toute époque, qui ne peut être changée » et de la loi islamique qui en découle : « une carte qui doit se conformer à cette boussole ».
Lorsque le Président Obama la recrute deux ans plus tard, de nombreux universitaires, comme la spécialiste du Moyen-Orient Elham Manea, s’inquiètent : « ces lois [de la Charia] perpétuent les discriminations envers les femmes dans la famille ». Elle conclue : « Obama ne veut pas ressembler à l’ancien président Bush qui avait des vues unidimensionnelles, et il adopte alors des vues opposées, mais elles aussi unidimensionnelles ».
Sur la chaîne Al-Arabiya, elle décrit sa mission dans l’administration Obama : « mon travail est d’étudier les musulmans, la façon dont ils pensent et leurs idées ». Dalia Mogahed n’a jamais peur de façonner une « communauté musulmane », de parler en son nom, ni de prêter à tous les musulmans les mêmes traits, quitte à les essentialiser et à faire perdurer les stéréotypes. Sa nomination s’inscrit par ailleurs dans la politique du gouvernement Obama de faire émerger des leaders communautaires. Aussi étonnant que cela puisse paraître, Al-Arabiya rapporte que Dalia Mogahed se donne également pour mission de chercher à « réduire le nombre d’avortements ».
Le site Islam Online, créé par le leader spirituel des Frères musulmans Youssef Al-Qaradawi ayant légitimé les attentats-suicides, parle de Dalia Mogahed comme d’une « success story aux Etats-Unis ». Interviewée sur ce site internet en avril 2009, elle affirme que le djihadisme n’a rien à voir avec l’Islam : « beaucoup ont dit que les terroristes ont détourné l’Islam. Je ne suis pas d’accord. Je pense que l’Islam est sans danger, et est prospère dans les vies des musulmans de tous les pays ».
En octobre 2009, elle est invitée au dîner annuel de l’association frèriste CAIR (pointée du doigt par le FBI car soupçonnée de liens avec le Hamas, et classée terroriste aux Emirats Arabes Unis). Elle semble avoir annulé sa participation lorsqu’il a été rendu public qu’elle partagerait son dîner avec l’imam Siraj Wahhaj, ancien partisan de Nation Of Islam, défenseur du Cheikh Omar Abdel-Rahman et de la lapidation, il considère « Allah comme supérieur à la démocratie », et est cité comme « unindicted co-conspirator » dans l’attentat du World Trade Center en 2003. Elle a toutefois participé au dîner annuel de CAIR en 2015, et est annoncée à celui du 17 décembre 2016. CAIR publie des articles élogieux sur Dalia Mogahed sur son site web, et n’hésite pas à la féliciter pour son rôle auprès du président Obama.
Toujours en octobre 2009, elle donne une interview à la chaîne anglaise Muslima Dilemna, qui appartient au parti politique Hizb ut-Tahrir (ou parti de la libération islamique). Ce parti milite ouvertement pour la mise en place d’un Califat mondial régi par la Charia. Face à deux militantes de Hizb ut-Tahrir qui défendent la Charia comme source de législation et qui affirment que la femme ne doit pas avoir de position de leadership, elle n’émet aucune contradiction, et affirme : « je pense que la raison pour laquelle tant de femmes soutiennent la Charia est parce qu’elles en ont une compréhension très différente de la perception occidentale. La majorité des femmes dans le monde associent la justice entre les sexes, la justice pour les femmes, avec la Charia ». Dalia Mogahed en profite pour dire à ses interlocutrices que son rôle est de « transmettre au Président et aux autres représentants officiels ce que les musulmans veulent ».
En 2010, elle décrit le mouvement Gülen comme un « mouvement inspirant pour les musulmans ».
En 2012, elle s’adresse sur Twitter aux soutiens de Bachar al-Assad en leur disant qu’il n’a pas de légitimité car « il ne peut pas assurer la stabilité, la protection des minorités, ni la résistance à Israël ».
En 2014, elle est l’invitée d’honneur du dîner du CCIF, aux cotés de Marwan Muhammad, Rokhaya Diallo, Houria Bouteldja, Rachid Abou Houdeyfa, Nader Abou Anas, Ahmed Jaballah, ou encore Nabil Ennasri.
Outre CAIR, Dalia Mogahed a également été intervenante pour d’autres associations reliées aux Frères musulmans :
Islamic Circle of North America, ICNA, (congrès de 2015)
Muslim American Society, MAS, (congrès de 2016)
Islamic Society of North America – Muslim Student Association, ISNA-MSA (annoncée au congrès de 2016 aux cotés de Tariq Ramadan)
Muslim Public Affairs Council, MPAC, (congrès de 2016)
Personnalité montante de l’islam en France depuis la parution de son livre Islam de France, l’an I, l’imam d’Ivry-sur-Seine Mohamed Bajrafil est rapidement devenu la nouvelle coqueluche des médias qui lui ouvrent leurs pages d’entretiens et leurs plateaux télé. (ICI, ICI)
Ancien enfant précoce (il connaît par coeur le Coran depuis l’enfance), multidiplômé, incisif et cabotin, il aime à se flatter d’avoir lu tous les livres et de parler un français châtié et précis, résultat de ses études de linguistique. Très sollicité par ses fidèles sur les réseaux sociaux et lors de ses prêches et conférences, il prône un « islam du juste milieu » et les conseille aussi bien sur leur spiritualité la plus haute que sur la longueur de leurs sourcils : « Il est très déconseillé (…) de modifier le corps (…)… Les raser complètement, non, mais peut-être les disposer de manière à ce que (sic) vous plaisiez à votre époux. »
Ce qui séduit chez ce bel homme policé, c’est aussi son talent pour les punchlines et le patriotisme à toute épreuve qu’il affiche volontiers.
Revendiquant lumineusement son salafisme, qu’il qualifie de vrai salafisme, il œuvre à la réconciliation des divers courants de l’islam dans le giron de la France qui, selon lui, applique la charia mieux que n’importe quel pays au monde, au sens où cette dernière générerait in fine le régime politique le plus sage, le plus tolérant et le plus pacifique.
Ce premier article s’attache aux figures de l’islam contemporain auxquelles il se réfère.
Coutumier depuis 2011 des conférences en duo avec Tariq Ramadan, Mohamed Bajrafil affirmait à la mosquée de Vigneux-sur-Seine que celui-ci est « un penseur musulman respectable » bien qu’il ne soit « pas d’accord avec lui sur deux ou trois choses, ou une centaine de choses ». Une prise de distance respectable et suffisamment floue pour que l’on ne sache rien de ce désaccord. Sauf à entendre une explication donnée quatre ans plus tard à l’UOIF : « L’essentiel c’est que je le porte dans le cœur, mais que je sois divergent avec lui sur le plan des idées, parce que c’est ce qui va nous faire avancer. »
Et pour être certain d’être bien compris, il ajoute : « Si vous voulez que l’on soit intellectuellement siamois, on va rester là et faire du sur-place. »
Mohamed Bajrafil ne fait pas de sur-place, effectivement. Il applique la stratégie développée par Tariq Ramadan : « gagner en visibilité ».
« Le Frère Tariq », comme il le nomme affectueusement, ne peut en effet réaliser seul cette tâche : « Il est devenu porte-drapeau (…), mais il faudrait qu’il y en ait 36 000 comme lui pour faire savoir ce qu’est l’islam », déclare-t-il en 2015.
Pourtant, il parvient à persuader du contraire. Comme l’affirme le site FMMonitor, « d’une façon plus générale, il conspue également les intégristes déguisés, l’UOIF, Tariq Ramadan et certains de ses confrères, ajoutant que les jeunes musulmans ne se reconnaissent pas dans l’UOIF. »
Mais Tariq Ramadan n’est pas le seul Frère à bénéficier des faveurs du jeune prédicateur. L’imam d’Ivry, qui engage à l’amour et au lissage des désaccords mineurs et somme toute tellement humains, rend aussi hommage à Youssef Al Qaradawi à de nombreuses reprises. En 2012, il déclare que « c’est un humaniste convaincu avec lequel on peut être d’accord ou ne pas être d’accord » qui « n’est pas contre le peuple ou la religion judaïque ». Il questionne la véracité de l’antisémitisme de Qaradawi et considère qu’il s’agit d’une erreur négligeable, simplement à la mesure du prédicateur : « S’il l’a dit, c’est une erreur. Mais les erreurs des grands hommes sont grandes. » Selon lui, Qaradawi « est un très grand savant, quelqu’un qui a fait énormément de bien à notre communauté ». Et comme à l’accoutumée, il il prêche le juste milieu (« Il n’est pas prophète, donc on prend de lui des choses et on en contredit d’autres ») et la sagesse (« Mieux vaut une mauvaise action dont émanera une prise de conscience et de la modestie qu’une bonne action dont émanera de l’orgueil. Le prophète lui-même l’a dit dans un haddith. Et c’est ça l’esprit de Qaradawi et ce que je veux retenir de lui »), conseillant de « surtout éviter d’être manichéen ».
Mohamed Bajrafil prétend condamner l’antisémitisme : « Celui qui s’oppose fermement à l’importation en France du conflit israélo-palestinien de quelque bord que ce soit, rappelle également que l’antisémitisme est une hérésie. » Mais s’oppose-t-il à cette importation ?
Au sujet de l’antisémitisme de Qaradawi, il déclare en 2012 : « C’est mal connaître Qaradawi que de dire qu’il est contre les juifs et les chrétiens. Par contre, il a des positions claires sur l’occupation des Territoires palestiniens. (…) Plus de 99% des habitants de la planète trouvent la situation palestinienne inacceptable. »
Un an plus tôt, tandis qu’il s’exprime sur la démocratie, il déclare qu’elle « est bonne quand elle opprime les Palestiniens, mais quand ces derniers veulent jouir de la démocratie on leur dit Non » et précise au sujet d’Israël et du Droit international que « des personnes nous donnent des leçons, mais elles n’existent plus dès lors qu’elles sont applicables par un groupe de personnes bien précis ».
Par ailleurs, les mots clés (tags) sur son compte Dailymotion sont les suivants : « Gaza, droit international, politique, colonisation, indigène, Gandhi, Occident … ».
Enfin, il a participé à la Fondation Kawakibi avec d’autres Frères musulmans, mais l’a quittée après qu’elle a reçu des accusations en sionisme, insulte et soupçon suprêmes.
Que doit-on en déduire ?
L’imam d’Ivry défend et promeut des prédicateurs radicaux violemment antisémites.dnan Ibrahim est imam à la mosquée Shura de Vienne (Autriche). Il tente de se bâtir une réputation de personnalité progressiste, alors qu’il est le disciple de Saïd Ramadan al Boutih, l’un des plus violents Frères musulmans syriens prônant le djihad et la haine d’Israël. Adnan Ibrahim est accusé par Al Hayat TV d’avoir, le 16 septembre 2012, qualifié les Juifs de « nains bâtards » ayant empoisonné le prophète de l’islam et provoqué finalement sa mort des années plus tard, enjoignant à « venger Muhammad ». Dans ce prêche, Adnan Ibrahim maudit les Juifs qui « ne savent que faire vile infamie, meurtre, assassinat et trahison ». (Voir ici et ICI)
Mohamed Bajrafil s’étonne de l’indignation suscitée par ces propos : « Pourquoi se fait-il attaquer autant ? Ce qu’il dit, c’est pas lui qui l’invente. »
Comment, dès lors, interpréter son affirmation selon laquelle « il n’y a pas de verset poussant à tuer dans le Coran » ?
Mohamed Bajrafil fait la promotion, sur son compte Dailymotion, du blog de Tariq Ramadan et de celui de Zakir Naik, un télé-prédicateur conspirationniste et suprémaciste interdit de séjour au Royaume-Uni et au Canada depuis 2010, qui préconise la peine de mort pour les apostats, les musulmans qui renient leur foi et les homosexuels. Il a été accusé par des terroristes notamment de l’attentat de Dakha de les avoir radicalisés, bien qu’il condamne publiquement avec la plus grande fermeté l’État islamique, qu’il juge anti-islamique, et bien qu’aucune preuve n’ait pu être retenue contre lui. Pour lui, seul l’islam peut apporter la paix dans le monde.
Est-ce parce qu’il a « lu Ibn Salah avec lui » qu’il ne renie pas son maître Safwat Hegazy, figure majeure des Frères musulmans d’Égypte, mais que, bien au contraire, il s’en réclame ? Celui-ci fut nommé en 2012 candidat à la présidence de la Jamaa Islamiya, une branche dissidente et armée de la puissante Confrérie, créée en 1970, dont l’ancien président, Omar Abdelramane, est soupçonné d’avoir participé à l’attentat de 1993 contre le World Trade Center. La Jamaa El-Islamiya est également tenue responsable de l’attentat de Louxor en novembre 1997. Considérée comme une organisation terroriste par les États-Unis et l’Union européenne, la Jamaa El-Islamiya a affirmé renoncer à la terreur en 2003 et s’est convertie à la politique en créant en 2011 le Parti de la Construction et du Développement qui prône l’établissement de la charia.
Quant à Safwat Hegazy, il a été arrêté près de la frontière libyenne par les autorités égyptiennes pour avoir incité à la violence au Caire en 2013. Il tentait de fuir le pays, déguisé en femme sous un niqab.
Comment, dès lors, interpréter son affirmation selon laquelle « en islam, même en temps de guerre, tu n’as pas le droit de tuer quelqu’un sans l’avertir » ?
« Je ne suis pas frériste », assure-t-il. « Je suis universitaire, je n’ai pas une pensée post-it. Il y a des gens parmi les Frères musulmans qui ont des convictions qui ne sont pas différentes de celles que moi je partage. Mais il y en a d’autres, qui ont été exclus, qui ont des positions pas très loin de celles de Daech. »
Invité jeudi 15 septembre 2016 sur France 2, Mohamed Bajrafil a repris le discours prononcé la veille par Amar Lasfar sur Europe 1, selon lequel les terroristes ne fréquentent pas les mosquées. Un discours type des Frères musulmans en France et dans le monde.
Pas frériste, mais favorable à Tariq Ramadan et Nabil Ennasri, qu’il cite comme s’ils étaient des (et comme s’ils étaient les seuls) représentants légitimes des Français musulmans en raison de leur connaissance de la culture occidentale et, surtout, comme s’ils étaient des représentants potentiels que les médias refuseraient d’entendre. Il ironise sur le frérisme : « On nous dit, c’est la franc-maçonnerie ! » Car ces Frères musulmans sont, selon Mohamed Bajrafil, bien plus légitimes que l’imam Chalghoumi, leur bête noire. Ce pourquoi l’imam d’Ivry clame à qui veut l’entendre que l’imam de Drancy n’est pas imam et qu’il n’a pas de mosquée.
Pas frériste, mais présent au congrès de l’UOIF en 2014, en compagnie de Abdallah Benmansour , Tariq Ramadan, Hani Ramadan, Amar Lasfar, Ahmed Jaballah, Nabil Ennasri… Cette même année, il invite dans sa mosquée Nabil Ennasri, Abdallah Benmansour et Mohamed Ashaini.
Mohamed Bajrafil se rendra de nouveau au Bourget en 2015 et en 2016. En 2015, il est aussi présent à la Foire musulmane de Bruxelles, où se trouve également l’Égyptien Omar Abdelkafi, Frère musulman violemment antisémite délivrant par ailleurs des prêches violents contre les femmes non voilées. On retrouve Mohamed Bajrafil en compagnie de Moncef Zenati et Hassan Iquioussen (et Tareq Oubrou) à la première Rencontre annuelle des musulmans de Rouen.
Pas frériste, mais ne dédaignant pas disserter au côté d’Hassan Iquioussen, il défend le « prêcheur des cités » des « dénigrements » dont celui-ci serait victime. Membre de l’UOIF, Iquioussen affiche un antisémitisme et un négationnisme décomplexé. Selon lui, « les sionistes ont été de connivence avec Hitler » car « il fallait pousser les Juifs d’Allemagne, de France à quitter l’Europe pour la Palestine. Pour les obliger, il fallait leur faire du mal ». Il estime que Hamas, la branche palestinienne des Frères musulmans responsable de nombreux attentats et de vagues de terreur dans Gaza même, « fait du bon boulot ».
Pas frériste, mais partie prenante du Conseil théologique des musulmans de France (CFTM), dont l’UOIF a annoncé la création le 5 mai 2015 dans un communiqué de presse. Le CFTM rassemble une cinquantaine de théologiens, imams et prédicateurs gravitant dans la mouvance des Frères musulmans. Le Bureau exécutif se compose de neuf membres, dont Mohamed Bajrafil et quatre professeurs de l’IESH, inclus Ahmed Jaballah. Le CFTM s’inscrit selon celui-ci « dans une vision de modération » et a pour but demettre des avis juridiques (fatawas) sans les imposer sur la citoyenneté, l’enseignement, le ramadan…
Pas frériste, mais ardent défenseur du concept d’islamophobie et du CCIF , dont il loue les mérites et pour lequel il appelle aux dons le 20 janvier 2015, quelques jours seulement après les attentats de Charlie et de l’HyperCasher.
Havre de Savoir est un site internet qui relaie la prose des Frères musulmans en français. Dans sa présentation, Havre du Savoir explique :
« Havre de Savoir est une association qui a pour but de présenter l’Islam à travers une compréhension saine et authentique. Elle se donne pour objectif également de promouvoir ses valeurs éthiques et morales. »
De nombreuses organisations de la mouvance des Frères musulmans prétendent représenter la voie officielle et « authentique » de l’islam, alors qu’il s’agit en réalité de délivrer un message politique. Moncef Zenati, membre du bureau de l’UOIF et chargé de « l’enseignement et de la présentation de l’Islam » est l’auteur de la plupart des textes et vidéos du site. Les autres principaux intervenants sont Hassan Iquioussen ou Hani Ramadan. Un Club de lecture de l’organisation est organisé au Havre. Y ont été invités Christophe Oberlin, Nabil Ennasri ou encore Médine pour son livre avec Pascal Boniface.
L’organisation se félicite de la « réussite » des islamistes turcs et n’hésite pas à déclarer que la Turquie est le seul pays « où l’islam et la démocratie ont réussi là où aucun pays musulman n’a réussi ».
Par le biais de Havre de Savoir, de jeunes français apprendront à se méfier des Chiites, Zaydites, Alaouites et Yazidis, à « comprendre pourquoi ils ne sont pas conformes à la voie du Prophète ». En d’autres termes pourquoi ils sont l’ennemi. Rappelons qu’en Syrie, sous la loi de l’Etat islamique, les Yazidis sont réduits en esclavage et exterminés.
• Hussem AYLOUCH, président du CAIR de Los Angeles pour expliquer comment résister au « discours médiatique véhiculé après des événements comme le 11 septembre ou Charlie hebdo« .
Hassan Al Banna est régulièrement cité comme un guide incontournable, comme on peut le voir sur cette capture d’écran. L’organisation se réclame non seulement du fondateur des Frères musulmans mais aussi de Sayyid Qutb qui jusqu’à peu était renié par la Confrérie qui avait du mal à présenter sous un jour positif son apologie de la violence.
En juillet 2015, l’organisation illustre son profil Facebook avec une symbolique de la Rabaa.
108 000 personnes suivent le profil Facebook de Havre du Savoir. 108 000 personnes qui ont pu lire qu’il fallait se méfier des médias et des politiques français. Moncef Zenati a en effet déclaré lors de la condamnation à mort de Mohamed Morsi :
« Pas un mot dans le journal de 20h de France2. La France pays qui a vu naître les droits de l’homme, le pays défenseur de la démocratie n’est même pas capable de dénoncer une telle injustice. La France des valeurs républicaines est en train de tourner le dos à ses valeurs. Quand je pense que Manuel Valls ne s’est pas empêché de rappeler aux musulmans de France sa phobie des Frères Musulmans qu’il qualifie de mouvement inquiétant. Les opprimés sont inquiétants, alors que leur bourreau est accueilli à l’Elysée avec les honneurs. écœurant!!! »
Ce que Moncef Zenati oublie de dire c’est que :
• comme de nombreux autres leaders des Frères musulmans, il a été invité par le gouvernement de Manuel Valls à parler de l’Islam de France.
• plusieurs intellectuels, journalistes et militants ont déclaré leur opposition à la peine de mort pour des raisons politiques. Y compris parmi nos éditorialistes, qui ne sont pourtant pas connus pour être tendres avec la Confrérie.
Mais le dire impliquerait d’éviter de radicaliser les lecteurs de Havre du savoir, de leur donner le sens de la nuance, ce qui n’est visiblement pas le but de l’organisation.
Havre du savoir jouit d’une très bonne réputation en France. Le rappeur Médine n’a pas hésité à déclarer lutter contre l’islamophobie, au sein de l’association Havre De Savoir.
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