
Un rapport de la Chambre des Communes salué par les Frères Musulmans
La Chambre des Communes du Royaume Uni vient de publier un rapport où elle prend de grandes distances avec les critiques du gouvernement britannique contre la confrérie des Frères musulmans.
David Cameron avait en décembre 2015 déclaré que « certains des Frères musulmans ont une relation très ambiguë avec l’extrémisme violent », « tant comme idéologie que comme réseau, ils sont un rite de passage pour certains individus et groupes qui se sont ensuite engagés dans la voie de la violence et du terrorisme. , « ils ont manifesté leur opposition à al-Qaïda, mais n’ont jamais dénoncé de manière crédible l’utilisation par les organisations terroristes de l’œuvre de Sayyid Qutb, un des plus importants idéologues de la fraternité. », et que certains aspects de la Confrérie pouvait être en confrontation avec les « valeurs britanniques de démocratie, de liberté individuelle et de respect mutuel des différentes religions et croyances. ». Les liens de la Confrérie avec le Hamas avaient également été mis en valeur par le rapport gouvernemental, ainsi que la mainmise de la Confrérie sur de nombreuses œuvres de charité ou associations islamiques.
Les députés anglais ne semblent manifestement pas d’accord avec ces conclusions, pourtant argumentées, du rapport gouvernemental. Certains propos du rapport de la Chambre de Communes sont même particulièrement complaisants envers la Confrérie.
La Chambre des Communes suggère de collaborer avec les représentants de l’ « Islam politique » qui pour elle « participent et préservent la démocratie », qui ont une « interprétation de la foi qui protège les droits, les libertés et les politiques sociales compatibles avec les valeurs anglaises », et qui « ne font pas usage de violence ». Le parti islamiste Ennahdha de Rached Ghannouchi est même décrit comme « un exemple primordial » de parti qui a respecté ces critères ! La Chambre des Communes conclue que l’on doit « encourager les partisans de l’Islam politique (…) à accepter les valeurs démocratiques », et que le fait que la Confrérie soit « secrète et ambiguë » est « compréhensible du fait de la répression qu’elle a expérimentée ». Sans vraiment citer directement de représentants de l’Islam politique (mais en évoquant à plusieurs endroits l’AKP de Recep Tayyip Erdogan, le Parti de la Justice et du Développement marocain, ou encore le Parti de la Justice et de la Liberté de Mohamed Morsi) la Chambre des Communes suggère de « voir leur pragmatisme de ces islamistes-politiques comme une opportunité de s’engager avec eux ». Cependant, il paraît objectivement difficile de faire rentrer ces partis politiques dans les critères qu’elle décrit ci-dessus.
A propos de Mohamed Morsi, la Chambre des Communes affirme que « les peurs autour d’une introduction d’une interprétation restrictive de la loi islamique par le Parti de la Liberté et de la Justice étaient en partie dues à des spéculations plus qu’à une réelle expérience ». Elle regrette que le rapport gouvernemental ne parle pas de « l’événement le plus significatif de l’histoire des Frères musulmans qu’est l’intervention militaire qui les a destitué du pouvoir » ainsi de la répression de la Confrérie depuis août 2013.
Les députés se réjouissent que le gouvernement anglais n’ait pas désigné la Confrérie des Frères musulmans comme terroriste car « des groupes partisans de l’Islam politique ont été des remparts contre l’extrémisme et la violence ». Cependant, les députés affirment que le gouvernement a « détérioré la réputation du Royaume-Uni » avec les déclarations de David Cameron basées sur son rapport gouvernemental.
Les députés concluent : « la critique du manque de transparence qui est faite aux Frères musulmans s’applique également au rapport gouvernemental », rapport qui a « endommagé la réputation du Royaume-Uni pour un commerce équitable ».
Amr Darrag, ancien ministre de Mohamed Morsi, a félicité ce nouveau rapport de la Chambre des Communes sur le site Middle East Eye en la qualifiant d’ « initiative bienvenue » pour les relations entre les Frères musulmans et le Royaume-Uni.
Le site Middle East Monitor (MEMO) rapporte que les leaders des Frères-musulman à Londres se sont également félicités de ce rapport, le qualifiant de « document important ». Néanmoins, il regrette que le gouvernement ne change pas publiquement d’attitude envers la Confrérie suite à ce nouveau rapport.
Le fait que Sir John Jenkin (qui a supervisé la rédaction du rapport gouvernemental) ait été ambassadeur en Arabie Saoudite est pointé du doigt à la fois par le rapport gouvernemental, par Middle East Eye ou par le MEMO pour sous-entendre un parti-pris anti Frères-musulmans. La Chambre des Communes affirme que ce point n’a pas été abordé dans le rapport gouvernemental, ce qui « crée l’impression que l’Arabie Saoudite (…) aurait pu influencer le rapport ». En revanche, le rapport de la Chambre des Communes ne rappelle pas que son propre rapport a été dirigé sous la direction de Crispin Blunt, qui a été longtemps responsable du Council for Arab-British Understanding (CAABU). Le CAABU s’est notamment opposé à la décision des Emirats Arabes Unis de classer les associations des Frères musulmans de terroristes, en prenant notamment la défense de l’ONG Islamic Relief qu’Ikhwan Info a déjà présentée ici.
Les députés de la Chambre des Communes ayant réalisé le rapport sont Crispin Blunt MP (Conservative) (Chair), Mr John Baron MP (Conservative), Ann Clwyd MP (Labour), Mike Gapes MP (Labour), Stephen Gethins MP (Scottish National Party), Mr Mark Hendrick MP (Labour), Adam Holloway MP (Conservative), Daniel Kawczynski MP (Conservative), Ian Murray MP (Labour), Andrew, Rosindell MP (Conservative), Nadhim Zahawi MP (Conservative), Yasmin Qureshi MP (Labour).
Carla Parisi
Pour lire le rapport gouvernemental :
Cliquer pour accéder à Muslim_Brotherhood_Review_Main_Findings.pdf
Pour lire le rapport de la Chambre des Communes : http://www.publications.parliament.uk/pa/cm201617/cmselect/cmfaff/118/11801.htm






































