
Tariq Ramadan vole au secours de CAGE
Depuis presque un an, Tariq Ramadan resserre ses liens avec l’association CAGE, plusieurs fois épinglée pour ses positions islamistes et pro-djihad, par la presse et Ikhwan Info. Analyse d’un partenariat qui perdure :
- Le 18 juin 2016, l’association CAGE organise une conférence avec Tariq Ramadan pour célébrer la rupture du jeûne. Et surtout pour sceller le rapprochement entre le prédicateur suisse et l’association britannique.

La vidéo de cette conférence est visible sur le site internet de Tariq Ramadan. (ICI) Il y « remercie » CAGE et appelle le public à la « soutenir ». Pour Tariq Ramadan, CAGE fait un travail « essentiel », se bat pour la « liberté d’expression », et surtout contre « Prevent », le programme anti-radicalisation du gouvernement anglais. Tariq Ramadan affirme que « face aux injustices, on demande aux musulmans d’être silencieux pour être acceptés ». Or selon lui, « l’Islam c’est ne pas être silencieux face aux gouvernements corrompus ». Il fait alors l’éloge de CAGE… Doit-on en conclure que pour être un bon musulman, il faut soutenir CAGE ? C’est en tous cas ce que sous-entend habilement Tariq Ramadan. La vidéo s’intitule d’ailleurs The Story of Dawud, et fait un parallèle entre CAGE (David) se battant contre les « corrompus », contre les « géants » (Goliath).
L’année précédente, en 2015, l’invité d’honneur de CAGE pour la rupture du jeûne n’était autre qu’Abu Qatada. Rédacteur et support idéologique du journal du GIA, Usrat-al-Ansar, dans les années 90, puis figure incontournable du Londonistan, surnommé « l’ambassadeur de Ben Laden en Europe », avant d’être expulsé en Jordanie en 2013, il est l’auteur de plusieurs fatwas autorisant le meurtres d’apostats, de juifs, ou encore d’américains. Il avait déclaré juste après les attentats du 11 septembre 2001 qu’il ne s’agissait que d’une « réponse aux politiques injustes de l’Amérique ». Après avoir appelé à la création d’un état islamique, il est désormais plus proche des rangs djihadistes du Front al-Nosra, et participe au magasine pro-al-Qaida, Al-Risalah. Tariq Ramadan ne semble visiblement pas embarrassé de prendre le flambeau après Abu Qatada pour l’Iftar 2016 de CAGE.

- Le 5 décembre 2016, Tariq Ramadan apparaît dans une vidéo postée par CAGE, où il appelle à soutenir l’association : « soutenez le travail de CAGE, soutenez le financièrement, aucun gouvernement ne paiera jamais car c’est exactement ce qu’ils ne veulent pas voir (…) c’est notre devoir, du côté des opprimés (…) donnez votre argent, autant que vous le pouvez ».
- Le 29 janvier 2017, Tariq Ramadan participe au colloque de CAGE intitulé Emergency Live Appeal, littéralement Appel d’Urgence en Direct. Il s’agit encore une fois de récolter des fonds pour CAGE, qui se dit en situation financière « précaire ». Sont également annoncés présents Adnan Siddiqui, directeur de CAGE, Moazzam Begg, directeur adjoint de CAGE, Asim Qureshi, directeur de recherche de CAGE, Ibtihal Bsis, avocate et représentante d’Hizb ut-Tahrir, Majid Freeman, qui se présente comme travailleur social, ainsi que Suliman Gani, imam à Tooting.

Adnan Siddiqui appelle à désobéir aux lois anglaises en matière de lutte anti-terroristes : « nous devons nous sentir assez surs de nous pour défier les lois. Ils n’aiment pas les gens comme nous qui leur disent ». Adnan Siddiqui s’était fait connaître du grand public en Angleterre en 2014 après avoir affirmé que l’attentat suicide d’un djihadiste anglais contre une prison d’Alep pour libérer des prisonniers, et qui avait tué des dizaines de personnes, était « un prix qu’il valait la peine de payer ».

Asim Qureshi est à la table ronde contre le programme anti-radicalisation Prevent avec Ibtihal Bsis. Asim Qureshi avait provoqué un tollé en 2015 après avoir décrit Jihadi John, de son vrai nom Mohammed Emwazi, bourreau de l’Etat Islamique, de « très beau jeune homme », « extrêmement gentil, doux, la personne la plus humble que je connaisse », après avoir été un certain temps en contact avec lui. Pour Asim Qureshi, sa radicalisation est due aux autorités britanniques. Dans un précédent colloque organisé par Hizb ut-Tahrir en 2006, il y déclarait à propos de la Palestine, de la Tchétchénie, de l’Irak, du Kashmir et de l’Afghanistan : « nous savons qu’il incombe à chacun d’entre nous de soutenir le djihad de nos frères et sœurs dans ces pays lorsqu’ils font face à l’oppression de l’Occident ».
Ibtihal Bsis représente le parti Hizb ut-Tahrir. Ce parti appelle au rejet de la démocratie considérée comme impie, à la mise en place d’un califat mondial, à la destruction d’Israël et à l’instauration de la Charia sans aucune autre forme de jugement. N’incitant pas directement à la lutte armée (bien qu’il glorifie le djihad) il n’est pas considéré comme terroriste par les Etats-Unis, à la différence de plusieurs pays d’Asie comme la Chine ou la Russie.

Majid Freeman confesse faire appel à CAGE pour pouvoir effectuer des allers-retours en Syrie avec son œuvre de charité : « quand je pars de Syrie pour mon travail de charité j’appelle CAGE pour des conseils légaux et idem lorsque j’y repars ». Majid Freeman a déjà été épinglé pour avoir fait l’éloge de membres d’al-Qaïda, du Front al-Nosra ou encore pour avoir justifié des crimes de l’Etat Islamique.

Suliman Gani rend hommage à CAGE qui « sécurise la liberté des prisonniers ». Suliman Gani est connu pour avoir mené une campagne de boycott contre les magasins ahmadis à Londres : « Puisque les Qadianis (injure pour désigner les ahmadis) sont habituellement trompeurs quant à leur religion, il y avait un risque potentiel que les musulmans se voient proposer de la viande qui n’était pas nécessairement halal ». Il a également travaillé trois ans pour le Ministère de la Santé en tant qu’aumônier musulman à l’hôpital de Tooting, tout en s’opposant aux transfusions sanguines et à l’avortement. Il considère l’homosexualité comme « non-naturelle » et les femmes comme « asservies » aux hommes.

Tariq Ramadan et Moazzam Begg concluent la conférence. Tariq Ramadan insiste sur le rôle de CAGE dans la « défense de la liberté d’expression ». On comprend mieux pourquoi il n’a pas défendu celle de Charlie Hebdo : peut-être était-il trop occupé à défendre celle des pro-djihad ? Tariq Ramadan réitère alors des les compliments et autres appels au don pour CAGE… sans jamais apporter aucune contradiction à aucun des autres participants, bien au contraire.
