
« Bandung du Nord » : nouveau colloque indigéniste et islamiste à Saint Denis
Du 4 au 6 mai 2018 se tiendra à la Bourse du Travail de Saint-Denis (93) une conférence organisée par le « Réseau Décolonial International », intitulée « Bandung du Nord, vers une Internationale Décoloniale ». Elle réunit pour une nouvelle fois dans ce lieu les mouvances indigéniste et islamiste (tendance Frères musulmans et Hezbollah), accompagnées de quelques têtes d’affiche internationales comme Angela Davis.

Le colloque veut s’inscrire dans l’esprit de la conférence de Bandung de 1955, qui a marqué l’entrée des pays décolonisés du Tiers-Monde dans la scène internationale, et ambitionne de sceller « une alliance politique entre les mouvements décoloniaux d’Occident ». Qui seraient les nouveaux Nasser, Nehru, ou encore Soekarno présents en 2018 à la Bourse du Travail de Saint-Denis ?
Voici les intervenants annoncés :
- Angela Davis, membre des Blacks Panthers, qui s’était déjà rendue à Saint-Denis en 2015 à la conférence célébrant les 10 ans d’existence du Parti des Indigènes de la République.
- Elie Domota, porte-parole du parti politique guadeloupéen LKP. En février dernier, il rencontre le militant suprématiste noir Kémi Seba, leader de la milice Tribu Ka dissoute en 2006 pour son antisémitisme. Kemi Seba évoque alors sur son compte facebook un « coup de foudre affectif » avec Elie Domota.
- Houria Bouteldja, membre fondatrice du PIR. Une obsession « antisioniste » la poussera à écrire en 2015 que « Les juifs sont les boucliers, les tirailleurs de la politique impérialiste française et de sa politique islamophobe ». Dans son dernier ouvrage, « Les Blancs, les Juifs et nous », elle se distingue par des propos antiféministes et essentialistes : « J’en viens à préférer les bons gros machos qui s’assument. Je vous le dis mes sœurs, il faut trancher dans le vif. Quand les hommes de chez nous se réforment sur injonction des Blancs, ce n’est pas bon pour nous. Parce qu’en fait, ils ne se réforment pas. Ils font semblant. », ou encore homophobes : « Il n’y a pas d’homosexuels en Iran.” C’est Ahmadinejad qui parle. Cette réplique m’a percé le cerveau. Je l’encadre et je l’admire. (…) Ahmadinejad, mon héros ».
- Rokhaya Diallo, fondatrice des Indivisibles, actuellement chroniqueuse dans l’émission de Cyril Hanouna, Touche pas à mon poste.
- Sihame Assbague, co-organisatrice du camp d’été décolonial, en non-mixité raciale, réservé aux personnes « racisées ». En février 2018, elle signe la pétition demandant la remise en liberté de Tariq Ramadan, accusé de viol, violences et menaces par plusieurs femmes.
- Ibrahim Bechrouri, chargé de cours à l’Université Paris 8 et de Versailles, et porte-parole du Collectif Contre l’Islamophobie en France (CCIF).
- Ismahane Chouder, animatrice de Participation et Spiritualité Musulmane (PSM) et intervenante vedette de Lallab, elle se bat surtout pour le voile, contre le mariage homosexuel aux côtés de la Manif pour tous, contre l’IVG et la « théorie du genre » aux côtés d’Alliance Vita et bien sûr contre Charlie Hebdo aux côtés du PIR. Elle est également porte-voix du mouvement islamiste marocain Al Adl Wal Ihsane.
- Nacira Guénif, sociologue et enseignante à l’Université Paris 8. Lors du procès de George Bensoussan, elle affirme en qualité de témoin que « espèce de juif » n’est pas une insulte.
- Stella Magliani-Belkacem, éditrice aux éditions La Fabrique. En 2013, elle créé la polémique en affirmant dans son livre « Les féministes blanches et l’empire » que « l’homosexualité, comme identité » est « une notion » occidentale qui n’est pas adaptée au monde arabo-musulman et africain. Par « analogie », l’homosexualité ne serait pas non plus une « notion » adaptée aux habitants des « quartiers populaires ». Elle dénonce alors un prétendu « impérialisme gay », alors même que les rapports des associations anti-homophobie dans les quartiers populaires sont alarmants.
- Arzu Merali, cofondatrice de l’Islamic Human Rights Commission (IHRC). Reconnue comme un promoteur du khomeinisme iranien en Angleterre et en Europe, cette commission a fait campagne pour la libération du cheikh Omar Abdel Rahmane, condamné pour son rôle dans les attentats du World Trade Center en 1993. A la mort du Cheikh en février 2017, l’IHRC publie une lettre de condoléances intitulée « Le monde a perdu un homme de principes et de foi inébranlable ». Deux mois après les attentats de Charlie Hebdo qui ont décimé une conférence de rédaction, l’IHRC délivre au journal satirique le « prix de l’islamophobe de l’année ».
- Nordine Saïdi, fondateur du Mouvement Citoyen Palestine, du parti EGALITE et du Bruxelles Panthères. En 2010 il signe une tribune aux côtés d’Alain Soral pour l’abrogation de la loi Gayssot et pour la libération du militant négationniste Vincent Reynouard. Il se fait exclure du Mouvement contre le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie (MRAX) pour ses positions pro-islamistes et des partages de dessins antisémites. En 2009, il affirme « Je comprends les attentats suicides ou terroristes sans nécessairement les justifier. En tout cas, je m’interdis de condamner des faits sans parler des causes. Oui, je refuse de condamner des attentats terroristes ! ». Il est également porte-parole et 1er suppléant du parti politique belge ISLAM en 2012, parti qui prône l’instauration de la charia en Belgique, ainsi que la peine de mort et la pénalisation de l’avortement.
- Hatem Bazian, enseignant à l’Université de Berkeley sur la théologie islamique et militant pro-palestinien. En 2017, il doit s’excuser après que l’Université de Berkeley ait condamné plusieurs de ses retweets de dessins antisémites sur le réseau social Twitter.
- Amal Bentounsi, fondatrice du collectif « Urgence notre police assassine ». En 2015, le collectif est au cœur d’une polémique après avoir affirmé sur son compte Facebook : « nous refusons de nous positionner sur la question de l’homosexualité d’une manière ou d’une autre (….) on ne peut pas en vouloir à un croyant d’être homophobe si sa religion l’est ».
- Saïd Bouamama, sociologue, militant au FUIQP, intervenant régulier sur le site Investig’Action de Michel Collon, adepte des propos conspirationnistes. En 2015, lors d’une conférence commune avec Saïd Bouamama, Michel Collon affirme que les frères Kouachi ont en réalité été formés et armés par Laurent Fabius.
- Fred Hampton Jr, fils de Fred Hampton Sr, membre des Black Panthers tué par la police de Chicago.
- Ramon Grosfoguel, enseignant à l’Université de Berkeley, et militant pour une « décolonisation » de l’universalisme.
- Muntadhar al-Zaidi, journaliste irakien rendu célèbre en 2008 après avoir lancé ses chaussures sur le président américain George W. Bush.
- Norman Ajari, enseignant à l’Université de Toulouse et membre du PIR.
- Quim Arrufat, membre de la coalition pour l’indépendance de la Catalogne.
- Azzedine Badis, militant toulousain pro-palestinien et anti- « islamophobie ».
- Ludivine Bantigny, membre du collectif « Ni guerres, ni état de guerre », chercheuse au Centre d’Histoire de Sciences Po et intervenante régulière sur France Culture.
- Hourya Bentouhami, maître de conférence à l’Université de Toulouse en philosophie politique sur l’apport des théories post-coloniales.
- Boubacar Boris Diop, romancier sénégalais.
- Amzat Boukari, secrétaire générale de la Ligue Panafricaine.
- Youssef Boussoumah, militant pro-palestinien et membre du PIR.
- Safa Chebbi, militante décoloniale au Québec.
- Mireille Fanon Mendès-France, membre de la fondation Frantz Fanon.
- Sebijam Fejzula, fondatrice de Kale Amege, organisation décoloniale rom.
- Sandew Hira, coordinateur du Réseau Dcolonial International.
- Redouane Ikil, membre du collectif « Justice pour Redouane Ikil ».
- Franco Lollia, porte-parole de la Brigade Anti-Négrophobie.
- Christian Padure, enseignant en langue et civilisation romani.
- Andre-Yanne Parent, élue dans plusieurs commissions d’organismes autochtones au Canada.
- Abdourahmane Seck, anthropologue et historien à Saint-Louis.
- Michèle Sibony, membre de l’Union Juive Française pour la paix (UJFP), compagnon de route du PIR.
- Omar Slaouti, ancienne tête de liste du NPA et membre du collectif Vérité et Justice pour Ali Ziri.
- Léo Takeuchi, vice-président de Asia2.0.
- Vanessa Ellen Thompson, chercheuse décoloniale associée à l’Université de Francfort.
- Françoise Vergès, intervenante régulière aux côtés du PIR, présidente du Comité nationale pour la mémoire et l’histoire de l’esclavage.
- Louisa Youfsi, militante décoloniale et présentatrice de l’émission Paroles d’Honneur.
- Paola Bacchetta, enseignante à l’Université de Berkeley
Il s’agit au final de réunir pour une nouvelle fois la même nébuleuse associative et militante « décoloniale » à la Bourse du Travail de Saint-Denis. Mise à part la présence de quelques personnalités étrangères, dont la présence sert à attirer un public plus large, souvent peu informé, il n’y a pas de renouvellement des intervenants. Notons que le milieu universitaire est très représenté : environ un tiers des intervenants en sont issus (enseignants, chercheurs, chargés de cours…). Au-delà des militants décoloniaux et indigénistes, plusieurs alliés issus de deux grandes mouvances de l’Islam politique sont présents. La tendance issue des Frères musulmans se retrouve avec des participants tels que Ismahane Chouder ou le CCIF, tandis que la tendance islamiste chiite se retrouve avec la présence de l’IHRC, qui promeut ouvertement le Hezbollah (organisation classée terroriste par l’Union Européenne).